Par Laurent Hincker, avocat spécialiste en droit de la famille. 31 mars 2017
Quand il s’agit de violence psychologique ou de harcèlement moral, la question de la preuve se pose invariablement. Le certificat médical est un commencement de preuve indispensable pour les juges, or il se heurte depuis des années à l’exigence de secret professionnel des médecins et sages-femmes. Des progrès notables ont été faits depuis le loi du 17 novembre 2015. Les victimes et les professionnels trouveront des conseils utiles sur le site de la MIRPROF.
La MIRPROF (Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains) a été créée par le décret n° 2013-07 du 3 janvier 2013. Cette structure a pour objet de rassembler, analyser et diffuser les informations et données relatives aux violences faites aux femmes. Confrontée au problème de la preuve par le certificat médical, elle a précisé le rôle des médecins. Partant du secret professionnel défini par l’article 4 du Code de déontologie médicale / Article R 4127-4 du Code de la santé publique : « Le secret professionnel, institué dans l’intérêt des patients, s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris », elle stipule que l’article 226-14, 2° du Code pénal mentionne l’existence de dérogations à cette obligation de respect du secret professionnel, notamment en cas de sévices permettant de présumer de la commission de violences sur une personne majeure. Dans ce cas, la déclaration du médecin ne peut être faite auprès du procureur de la République qu’avec l’accord de la victime majeure.
Le certificat descriptif, avec la mention éventuelle de l’état psychologique, doit être remis à la victime. Il est indiqué qu’il est opportun de la diriger, si possible, vers une unité médico-judiciaire.
Enfin, la loi du 5 novembre 2015 apporte des modifications intégrées dans l’article 226-14, à savoir que le médecin ou tout autre professionnel de santé constatant des sévices physiques ou psychiques, peut les porter à la connaissance du procureur sans l’accord du patient lorsque la victime est un mineur ou une personne non en mesure de se protéger en raison de son incapacité physique ou psychique.
Dès lors, nous pouvons nous poser la question de savoir si le non signalement ne constitue pas en soi un délit de non-assistance de personne en danger ou en péril (article 223-6 du Code pénal).
Au-delà du certificat médical, le médecin doit délivrer un certain nombre de conseils et d’informations notamment :
- affirmer clairement que les violences sont interdites par la loi et que les actes de violence relèvent de la seule responsabilité de leur auteur ;
- conseiller à la patiente de se rendre, en cas d’urgence, dans les locaux des services de police ou de gendarmerie, ou encore appeler le 17 qui permet de joindre ces services (ou le 112 d’un téléphone portable) ;
- inviter la victime à appeler le 3919 (Violences femmes info), numéro gratuit d’écoute et d’information anonyme et qui n’est pas repérable sur les factures et les téléphones ;
- informer la victime de l’existence d’associations d’aide aux victimes ;
- informer la victime de la possibilité de porter plainte ;
- évaluer le danger : présence d’arme, menace de mort, tentative de strangulation, idées suicidaires ;
- proposer une nouvelle consultation dans un temps court.